L’itinéraire était tracé
Pour endiguer ces hordes — femmes,
Enfants, nourrissons, vieilles gens —
Qui avaient tout abandonné
Et fuyaient, fonçant vers nulle part,
Laissant vélos, landaus, fardeaux
Disparaître dans le peloton
Du tour de France de mai 1940.
Mais où étaient partis les hommes ?
Il faisait beau. Du ciel tout bleu
Tombaient des bombes. Lors, plaqués
Au sol, le nez dans les orties,
Sous le vacarme des Stukas
On entendait vrombir la peur
Marteler les tympans du cœur.
Les bébés hurlaient à la vie.
Mais qu’étaient devenus les hommes ?
Fureur d’éclairs et de tonnerre…
Marcher la nuit avançait peu.
L’itinéraire tournait en rond
Le temps que les soldats d’ici
S’apprêtent à tirer sur ceux
Qui tiraient, tiraient sur nous
Bouclier humain qu’on était.