« Sale Belge ! » Ça y était, c’était reparti, il savait que ça n’allait pas cesser, que toujours il serait un « sale quelque chose » et qu’il n’en finirait pas de déguster…

Il pénétrait dans la cour de récréation de l’école pour la première fois et l’apostrophe était claire, nette, bien lancée, sans un soupçon d’hésitation, toujours la même fermeté dans la façon de faire claquer le « sale »…

Les gamins jouaient à la guerre, c’est à ce jeu qu’ils étaient les plus doués. Les cris montaient, les corps s’affrontaient, des pleurs tombaient parfois au fond des gorges mais l’énergie était à son comble, la violence parfaite. Lire la suite


L’avion flotte dans le brouillard, quelques secousses font frissonner la glace dans les whiskies de secours, l’hôtesse sourit comme si nous étions des enfants malades, le steward s’accroche à son chariot et je me dis que décidément il faudra dormir un peu pour ne pas sentir toute cette ivresse envahir lentement les travées où seuls les bébés semblent prendre les trous d’air comme un cadeau du commandant qui leur aurait, rien que pour eux, préparé un voyage disneyen. Ça monte et ça retombe comme sur la grande roue de la Foire du Midi, quand Bruxelles, à la fin de l’été, joue dans les odeurs de caricoles et de frites la fête d’une innocence qui semblerait oublier le prix qu’il faut payer pour échapper quelques minutes à l’inquiétude du monde. Bruxelles caracole dans des nuages de parfums gras, les filles roulent des hanches et tendent le buste pour mieux défiler entre les baraques foraines où les bonimenteurs vantent leur charme d’un air de connivence que les hommes semblent accepter en serrant un peu plus fort la main de leur belle qui se fait saluer à coups de fusils à plombs et de ballons crevés. Des rires et des éclats de voix accordent la musique des petits bonheurs à ces instants de malentendu qui deviendront en un hiver le meilleur souvenir d’une saison. La fête piétine mais les jeunes filles passent et repassent comme si le chemin d’un éventuel amour devait passer aussi par là… Lire la suite


La version qui circula fut celle de l’accident. Trop de honte probablement, trop d’enthousiasme à renverser la honte face contre terre, trop de joie à enterrer les hontes d’hier dans celle, fragile, qui venait de s’offrir, pleine page, à la face de toute la ville. Bruxelles brûlait. Lire la suite


« De la boue ! Te voilà encore redevenu de la boue ! Te v’ià souillé jusqu’aux fesses, imbibé de cette putain de terre qui nous englue les godasses, qui nous rentre dans la gorge, cette saloperie de gadoue qui nous enchaîne ici ! Te v’ià redevenu de la boue, mon fils, rien qu’un tas de merde qui rêve de soleil, de fortune et de gloire, mais t’es rien que de la merde, l’oublie jamais ! »

Quand la mère parle, elle sait y faire, rien que de l’image juste, franche, directe, au nom de son amour qu’elle dit, faut tout oser, franchir les portes mal éclairées, faut tout avouer, même le pire, et le pire, c’est moi. Lire la suite


D’un seul coup, le monde s’est déchiré, un dernier coup de théâtre, une cavale de série B, un dialogue historique avec un garde champêtre, une gendarmerie défaite le képi bas, la presse révélant un homme affalé à l’arrière d’une voiture blindée, hilare, détendu ou drogué, des têtes qui tombent et roulent jusqu’au panier de la revanche, des responsabilités de pacotille qui battent des ailes, une météo euphorique, de la matière, de la matière encore, de la matière enfin pour relancer la « fabrique Dutroux ». Lire la suite