À quand la récolte de l’abîme ?
René Char
1.
promeneur inaccompli
à chercher la trace d’anciens nuages
à prodiguer pour l’or
les ressources de la fièvre et des sueurs
sous les charpentes de l’azur
l’éphémère souverain veille le fragile
les sentinelles s’émeuvent de transparence
2.
nulle princesse n’évolue sous le voile
l’obscurité fomente dans les outrages soyeux
la déchirure sans retour des pleurs
une poussière de sel à meubler les ruines
contre la résignation des gouffres
iriser le lexique des chaînes
en relevailles pour la beauté mutilée
3.
porter la chaleur du doute
au lieu même où les certitudes aboient
forger un piaffement de vent
à la verticale de l’ordre des drapeaux
derrière la douceur des paupières
l’engagement maintient fervente la vigilance
et assume la chronique d’une étincelle
4.
ce n’est pas la feuille qui s’attache
mais l’arbre qui retient encore
lors des saisons sauvages du repli
les racines s’effondrent en solitude folle
sur l’eau claire des sources inassouvies
les reflets lancent des commentaires d’améthyste
mais la sève ne connaît pas d’estuaire
5.
prendre d’assaut les dynasties couronnées
comme l’épiderme ridé renverse l’enfance
privilège du mot à prononcer la déchéance
et vérifier le vertige à l’envergure de sa chute
dans les résidences d’exil
le cygne passe blanc sans trouble pour l’étang
et la victoire porte ses ailes à bout de bras
6.
il ne faut accorder au nombre indistinct
que vaine tentative à béquiller les astres
un tarot issu du ventre des corneilles
se plisse dans les jachères naïves de la langue
l’éveil a des allures de pente
de clarté longue face au brasier de menthe
et les fenêtres s’informent d’une moisson d’horizons
7.
bourrasques là où foisonne la fleur d’hortensia
écueils d’été à la vertu double
l’orient bascule en larguant des rafales aux frontières
et quelques incantations creusent une improbable perspective
puisque rien ne sortira de la lumière
ni dentelles d’étoiles ni foudre d’avenir
accumuler les baisers souples de la rencontre